Real Estate Project Manager chez Dominicé, François Lemercier revient sur la rénovation et la surélévation de l’immeuble détenu par le Dominicé Swiss Property Fund à l’Avenue de Bergières 59 à Lausanne – un projet emblématique mêlant patrimoine, transition énergétique et performance économique.
Pour commencer, pouvez-vous présenter les grandes lignes du projet de Bergières ?
Bergières est un projet ambitieux qui combine valorisation patrimoniale, transition énergétique et création de valeur durable. Nous avons mené une rénovation énergétique complète tout en réalisant une surélévation, ce qui a permis de créer un nouvel attique de 77 m² avec une terrasse plein sud de 38 m² et une vue exceptionnelle sur le lac Léman.
L’objectif était double : réduire de manière drastique l’empreinte carbone du bâtiment et améliorer sa performance économique.
Ce projet illustre comment un bâtiment ancien peut être transformé en un actif exemplaire, performant sur le plan énergétique tout en générant une réelle valeur économique
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Quelles étaient les ambitions initiales et les objectifs prioritaires du fonds sur ce projet ?
L’ambition du projet devait démontrer qu’il est possible d’allier une durabilité exigeante et une rentabilité maîtrisée, au bénéfice des locataires et des investisseurs.
Nous avions trois objectifs majeurs.
D’abord, améliorer la performance énergétique du bâtiment. Les émissions de CO₂ ont été réduites de 41 à 9 kg/m²/an grâce au remplacement de la chaudière à mazout par une pompe à chaleur air-eau et aux travaux d’amélioration de l’enveloppe. Cette rénovation complète a permis de faire évoluer l’étiquette énergétique de E à B.
Le deuxième objectif était d’accroître le potentiel locatif via la surélévation, qui représente une création de valeur directe et mesurable.
Enfin, il s’agissait de préserver et de valoriser un actif patrimonial dans un quartier en pleine mutation.
Quel a été votre rôle sur l’ensemble du projet ?
Le département développement a assuré la direction globale du projet, depuis la phase de faisabilité jusqu’à la livraison.
Mon rôle a été de garantir la cohérence entre les ambitions du fonds, les contraintes du site et les exigences des autorités.
J’ai piloté l’ensemble des dimensions techniques, réglementaires, budgétaires et opérationnelles, y compris la coordination des nombreux intervenants.
C’est un rôle transversal qui exige un équilibre permanent entre vision stratégique et pragmatisme opérationnel.
Concrètement, comment s’est déroulé le projet, de la conception à la livraison ?
Nous avons commencé par des études de potentiel – technique, énergétique et économique –, qui ont été déterminantes pour calibrer les interventions.
Ensuite, il a fallu obtenir les autorisations et optimiser le projet avec la Ville. Nous avons ensuite piloté les appels d’offres d’entreprises avec discipline pour maitriser les couts et délais.
La réussite du projet repose sur une coordination précise entre l’architecte, les ingénieurs CVSE, les énergéticiens et les entreprises, ainsi que sur un pilotage rigoureux des étapes de réception, de certification et de mise en location
C’est un développement qui s’est construit par itérations successives, en intégrant à chaque étape les contraintes de transition énergétique et les impératifs économiques du fonds.


Comment ce projet s’inscrit-il dans la stratégie globale du Dominicé Swiss Property Fund ?
Le fonds vise à disposer d’actifs résilients, modernisés et à fort potentiel de création de valeur. Bergières illustre parfaitement cette stratégie : cibler des immeubles à transformer, investir fortement dans la performance énergétique et activer les réserves de droits à bâtir quand cela est pertinent.
Le projet s’inscrit également dans la volonté du fonds de renforcer ses performances ESG.
Nous sommes classés quatre étoiles au GRESB et figurons au deuxième rang de notre catégorie démontrant que nous jouons pleinement un rôle de leader en matière de durabilité.
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Quels étaient les objectifs à l’échelle du bâtiment, mais aussi du portefeuille et des investisseurs ?
Il s’agissait d’abord de préserver la valeur du bâtiment dans un marché toujours plus exigeant. Ensuite, de renforcer les performances ESG du portefeuille grâce à une amélioration nette de l’efficience énergétique.
Le projet génère aussi une hausse de 30 % de l’état locatif, soit plus de CHF 100’000 de revenus additionnels par an.
Les charges énergétiques futures sont fortement réduites, ce qui bénéficie tant aux locataires qu’aux investisseurs. Enfin, la valeur du bien est stabilisée et renforcée à long terme grâce à sa modernisation en profondeur.
Quels ont été les principaux défis rencontrés pendant le chantier ?
Ils ont été multiples. Sur le plan technique : intégrer une pompe à chaleur dans un bâtiment existant, surélever l’immeuble tout en maintenant les locataires en place et intervenir chez nos locataires en limitant les nuisances.
Sur le plan administratif : le processus d’autorisation pour une surélévation est particulièrement exigeant, et nous avons dû coordonner les exigences de la Ville, du Service du patrimoine et du label Minergie Rénovation. Enfin, la coordination a été un défi en soi, car les études structurelles et énergétiques ont nécessité plusieurs ajustements de plans. Le grand enjeu a été de maintenir un équilibre entre ambition architecturale, contraintes techniques, viabilité économique et valorisation patrimoniale.
Quels ajustements ont été nécessaires en cours de projet ?
Nous avons optimisé la typologie de l’attique pour maximiser sa valeur locative, adapté les solutions énergétiques pour obtenir le meilleur rapport performance/coût et rationalisé certains détails architecturaux afin de maîtriser coûts et délais. Les renforts structurels liés à l’ajout d’un niveau ont également fait évoluer le projet.
C’est typique des chantiers complexes : il faut rester agile sans jamais sacrifier les objectifs fondamentaux.
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Le projet a été mené en étroite collaboration avec le Service du patrimoine. Comment cela a-t-il influencé les choix techniques et architecturaux ?
La collaboration avec le service du patrimoine de Lausanne a été déterminante jusqu’à la réception de l’ouvrage.
En effet, le Service du patrimoine a validé les matériaux, les couleurs, les menuiseries et les garde-corps via un cahier de matérialité très précis. Nous avons restitué fidèlement de nombreux éléments : lambris de l’avant-toit, porte d’entrée reproduite à l’identique, teintes d’origine dans la cage d’escalier.
Certaines contraintes ont nécessité des solutions techniques spécifiques : repositionnement des fenêtres pour préserver les profondeurs d’embrasure, encadrements reproduits à l’identique, remplacement complet des garde-corps pour répondre aux normes actuelles.
L’objectif a toujours été le même : respecter l’authenticité architecturale tout en répondant aux exigences contemporaines.

Quelle est, selon vous, la “patte” Dominicé dans un projet comme celui-ci ?
C’est une approche analytique, rigoureuse et orientée performance. Nous recherchons systématiquement le meilleur équilibre entre durabilité, rendement et potentiel futur. Chaque décision est finement analysée et optimisée. Et surtout, nous savons mener des opérations complexes dans des environnements urbains denses.
La signature Dominicé, c’est aussi une vision patrimoniale forte : investir aujourd’hui pour sécuriser demain, au bénéfice des investisseurs comme des locataires.
Dans 30 ou 50 ans, qu’aimeriez-vous qu’on pense de ces travaux ?
Je dirais : l’alliance d’une ambition durable, d’une rigueur technique sans compromis et d’une économie de projet parfaitement maîtrisée. Si dans trente ans le bâtiment reste exemplaire en confort, en performance carbone et en cohérence patrimoniale, ce sera la preuve que nous avons mené le bon projet.